Caroline Pino, 24 ans, est partie de Nimègue (Pays-Bas) le 10 juillet 1996 en compagnie d’un camarade, Mark, pour se rendre au festival « Rainbow Gathering » de Salto, au Portugal, en auto-stop. Ils y sont arrivés 10 jours plus tard. Caroline et Mark ont pris le chemin du retour le 24 juillet, car Caroline avait convenu de retrouver sa famille dans un camping de Paris le 28 juillet.
Le 25 juillet, tous deux sont pris en auto-stop par un Français au volant d’une fourgonnette blanche. Suite à un différend avec Mark, Caroline décide de continuer le voyage seule, avec ce Français, tandis que Mark poursuit de son côté pour être de retour aux Pays-Bas deux jours plus tard. Caroline est déposée à Castet, près d’un bar pour routiers, par le Français.Le 26 juillet, Caroline change un chèque de cent florins dans un bureau de change de Rennes. C’est là qu’elle a été vue pour la dernière fois. Personne ne sait comment elle s’est rendue de Castet à Rennes, qui n’est en outre pas sur le chemin de Paris. Caroline n’arrivera ensuite jamais au camping où sa famille l’attend.
Le 7 août 1996, un ouvrier autoroutier découvre le corps de Caroline près d’une bretelle d’entrée d’une route menant à Paris. L’endroit est situé sur le territoire de la commune d’Orsay (Essonne). Caroline est couchée dans un sac de couchage, les genoux repliés, et ne porte alors qu’un soutien-gorge et une culotte. Elle a apparemment été étranglée et a une côte cassée. Il n’est alors plus possible de déterminer si elle a subi des abus sexuels.
Je la surnommais toujours ma grande chérie Fifi Brindacier, se souvient sa mère, Wil Vreeburg. Caroline était une jeune à l’esprit créatif, sympa et pleine d’humour, qui cherchait à faire le bien, mais elle n’était pas comme toutes les jeunes filles de son âge. Dans sa jeunesse, Caroline a connu des années difficiles suite au divorce de ses parents et à sa relation compliquée avec son père biologique. C’était une ado rebelle qui n’a pas terminé ses études secondaires. C’est ainsi qu’elle est entrée à « Eigenwijs », un centre de formation de Nimègue pour jeunes sortis du système éducatif classique. Elle y a trouvé sa place et est devenue active et engagée, voire critique, sur le plan social. Elle est tranquillement devenue une belle jeune femme.
Dès la découverte du corps de Caroline, la police française diligente une enquête. Mais de nombreuses erreurs sont commises par cette dernière, qui manque de belles occasions de découvrir le coupable. Il faudra pas moins de trois mois avant que le corps de Caroline ne puisse être rapatrié et enterré aux Pays-Bas. De plus Wil, la mère de Caroline, n’est pas tenue au courant des développements de l’enquête, ce qui engendre de grosses frustrations. Il se passe des années avant que la police n’interroge des témoins en France, en Espagne et au Portugal, et n’identifie de possibles suspects.En 1997, Wil écrit une lettre au ministre de l’époque, qui lui répond que les Pays-Bas ne peuvent pas intervenir dans une enquête policière en France. Le ministre lui promet cependant de faire son possible. En 2017, l’équipe Cold case des Pays-Bas de l’Est contacte la police française, ce qui entraînera une passation de l’ensemble du dossier en 2018. Une enquête est donc ouverte aux Pays-Bas, et certains objets retrouvés en 1996, comme le sac de couchage de Caroline, sont de nouveau examinés. L’ensemble des résultats sont enregistrés dans une base de données internationale des ADN. Si l’affaire est désormais prescrite en France, en vertu du droit néerlandais, le meurtre ne sera jamais prescrit aux Pays-Bas. Mais là non plus, le dossier ne fait plus l’objet d’une enquête active.
Pour Wil, il n’est jamais trop tard pour parler. Depuis le premier jour, elle s’efforce de faire bouger la police, la justice et la sphère politique pour sa fille. Un an après le meurtre de Caroline, Peter R. de Vries a consacré plusieurs épisodes de son programme à cette mort mystérieuse. Wil a écrit de nombreux courriers à des politiques, n’a pas arrêté d’essayer de faire bouger les choses en France comme aux Pays-Bas, et a même publié un livre intitulé « Caroline » en 2000.
Et pourtant aujourd’hui, près de 28 ans plus tard, elle n’a toujours pas de réponses. « Pourquoi Caroline a-t-elle été assassinée ? » Wil explique : « Les proches de personnes assassinées à l’étranger sont confrontés à des procédures très compliquées. Le ministère des Affaires étrangères n’aide généralement pas beaucoup. C’est la raison pour laquelle j’en appelle aujourd’hui au monde politique, afin que tout cela change, pour tous les proches de personnes assassinées à l’étranger. Nous avons tellement besoin de réponses, et n’y parviendrons jamais sans aide. Pouvons-nous compter sur votre collaboration ? ».